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Dernières nouvelles du LHC : le rôle des injecteurs

Comment la chaîne d'injection du LHC a permis d'augmenter la luminosité de la campagne de collisions proton-plomb

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Pour ses quatre dernières semaines d'exploitation de l'année, le Grand collisionneur de hadrons (LHC) fait entrer en collision des protons (p) et des ions plomb (Pb). C'est un défi non seulement pour le LHC, mais aussi pour les six accélérateurs produisant les paquets de faisceaux qui entreront ensuite en collision à l'intérieur des quatre détecteurs ALICE, ATLAS, CMS et LHCb. Deux chaînes d'injection distinctes fournissent au LHC les faisceaux constitués de deux types différents de particules. Pour les protons, la chaîne inclut le Linac 2, le Synchrotron injecteur du PS (PS Booster, PSB), le Synchrotron à Protons (PS) et le Supersynchrotron à protons (SPS). Pour les ions plomb, elle comprend le Linac 3, l’Anneau à ions de basse énergie (LEIR), le PS et le SPS.

Le défi est double pour le complexe d'injecteurs. Premièrement, la configuration des paquets de protons doit correspondre à celle des ions plomb afin d'optimiser le nombre de paquets entrant en collision dans le LHC.

Idéalement, les protons et les ions plomb auraient le même nombre de paquets, espacés de la même façon. Toutefois, la technique d'injection des paquets d'ions plomb est contraignante. LEIR et le PS ne peuvent fournir au SPS qu'un faisceau d'ions constitué de quatre paquets espacés de 100 nanosecondes (ns), alors que lors des collisions proton-proton habituelles, le faisceau comprend 72 paquets espacés de 25 ns. Deuxièmement, l'intensité du faisceau de protons doit être réduite pour qu'elle corresponde à celle des ions plomb. Pour les collisions proton-ion, les paquets de protons doivent être cinq fois moins intenses qu'à l'ordinaire.

L'équipe des injecteurs a résolu le problème en faisant coïncider un train de deux lots, chacun composé de 18 paquets de protons, avec un train de sept lots, chacun constitué de quatre paquets d’ions de plomb (voir l'illustration pour plus de détails).

Les travaux du projet LIU, qui visent à améliorer la performance des faisceaux des injecteurs pour le futur LHC à haute luminosité, profitent déjà à la chaîne d'injection. Depuis le début de la période d'exploitation, les injecteurs d'ions de plomb ont fourni une intensité trois fois plus élevée que celle prévue lors de leur conception. Cela a permis d'atteindre une luminosité de pointe six fois plus élevée que celle prévue lors de la mise en place du programme proton-plomb, il y a quelques années à peine.

À l'heure où le présent article est rédigé, le LHC compte toujours atteindre tous les objectifs de physique de cette campagne, et ce malgré les difficultés techniques rencontrées telles que la coupure de courant la semaine dernière et une transition résistive le 24 novembre.

Lorsqu'elle n'est pas occupée à remplir le LHC, la chaîne d'injection produit des faisceaux pour le Décélérateur d'antiprotons (AD), l'expérience AWAKE et l'installation HiRadMat, ainsi que pour la zone Nord.

La procédure d'injection du faisceau de protons (en haut de l'illustration) débute avec le PSB, qui envoie d'abord quatre paquets dans le PS, suivis par deux autres 1,2 seconde plus tard. Les paquets sont ensuite divisés en trois dans le PS et espacés de 100 ns. Les 18 paquets ainsi formés sont accélérés à 25 GeV et injectés dans le SPS. Cette opération est répétée et le second groupe de 18 paquets envoyé au SPS, à côté du premier, avec un espacement de 200 ns. Accéléré à 450 GeV, le lot de 36 paquets est ensuite envoyé dans le LHC. La procédure d'injection du faisceau d'ions plomb (en bas de l'illustration) débute avec LEIR qui porte deux paquets d'ions à 72 MeV/nucléon avant de les envoyer au PS. Les paquets sont divisés en deux à l'intérieur du PS et leur espacement fixé à 100 ns. Le faisceau de particules accélérées est extrait en direction du SPS et traverse une feuille d'aluminium de 1 mm d'épaisseur qui débarrasse les ions de leurs 28 électrons restants. Cette opération, répétée six fois, permet de grouper dans le SPS sept trains de quatre paquets, espacés de 200 ns. Les 28 paquets sont ensuite injectés dans le LHC après avoir été accélérés à une énergie de 177 GeV par nucléon. A cause des différents espacements, dans chacun des trains, seuls les 27 paquets bleus entrent en collision. Chaque opération est répétée 20 fois pour remplir chacun des deux anneaux du LHC.