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La chambre TPC d’ALICE fait peau neuve

Après sa rénovation, le détecteur a été installé dans la caverne d’ALICE en août dernier

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The ALICE TPC is upgraded
La chambre à projection temporelle (TPC) d'ALICE subissant un test en salle propre en mai 2020 (Image: CERN)

« Encore un centimètre », précise le technicien en chef ce 14 août, alors que le système de vérins hydrauliques est à l’œuvre. Le détecteur cylindrique, d’un diamètre de 5 mètres et d’une longueur de 5 mètres, vient délicatement se placer en position d’attente 56 mètres sous terre, dans la caverne d’ALICE (au point 2 du LHC), où il va rester quelque temps. Après de longues années d’efforts, cette opération marque le point d’orgue de l’amélioration de la chambre à projection temporelle (TPC) d’ALICE, le détecteur LHC spécialisé dans les collisions d’ions lourds.

La chambre TPC d’ALICE est un gros cylindre rempli de gaz, percé d’un trou en son centre où viennent se loger le trajectographe au silicium et le tube de faisceau. Dans ce cylindre, la charge produite par les rayonnements ionisants est projetée sur les détecteurs situés aux deux extrémités. Auparavant, il s’agissait de chambres proportionnelles multifils, au nombre de 72. Ce dispositif est à présent remplacé par des systèmes à multiplicateurs d’électrons dans le gaz (GEM), une structure à micro-motif conçue au CERN. Ces systèmes, associés à une nouvelle électronique de lecture assurant une lecture continue, permettront à ALICE d’enregistrer les informations relatives à toutes les traces produites dans des collisions plomb-plomb à un débit de 50 kHz, générant des données à une cadence impressionnante : pas moins de 3,5 To/s. Dans ces conditions, la charge moyenne présente dans ces chambres pourrait atteindre 10 nA/cm², charge que les détecteurs GEM peuvent supporter. Cependant, on peut se demander si la performance de ces nouveaux systèmes sera aussi bonne que celle des détecteurs précédents.

(Video: CERN)

Des années de R&D intensive ont été nécessaires pour en avoir la certitude puisque le grand nombre d’ions positifs produits au niveau des détecteurs pouvait mener à des distorsions excessives. Il a aussi fallu prendre en compte la nécessité de conserver une excellente résolution des pertes d’énergie (dE/dx) des particules afin de pouvoir les identifier et le besoin impératif d’une bonne résistance aux décharges : autant de problèmes complexes, qui ont imposé une configuration innovante des détecteurs GEM.

Alors que l’atelier du CERN produisant les cartes de circuits imprimés s’attelait à la fabrication de plus de 800 feuilles de multiplicateurs d’électron dans le gaz (GEM), les nouvelles chambres et la nouvelle électronique ont commencé à être construites, puis testées dans le monde entier : une véritable prouesse logistique. La collaboration ALICE a mené à son terme le processus d’amélioration de la chambre TPC pendant le deuxième long arrêt du complexe d’accélérateurs du CERN (le LS2). Tout d’abord, la chambre TPC, dans son châssis bleu, a été extraite de la caverne souterraine, puis elle a été déposée dans une grande salle blanche en surface. Cette opération de transport délicate a été effectuée au moyen de grues, de vérins et d’un très grand camion. Le remplacement de la chambre, l’installation de l’électronique et les tests au moyen d’un système laser, de rayons cosmiques et de rayons X ont pris plus d’un an. Enfin, en juillet 2020, la chambre TPC a été jugée prête à réintégrer la caverne. Nouveau ballet de grues, de camion et de vérins.

Après des années intensives de R&D, de construction et d’assemblage, l’achèvement de l’amélioration de la chambre TPC constitue une date historique pour l’expérience ALICE. Fin 2020, tous les services seront connectés et la chambre TPC améliorée, dans son intégralité, sera mise en service, conjointement avec tous les autres détecteurs de l’expérience. Mais l’heure de vérité, ce sera pour plus tard, quand, après le LS2, les collisions reprendront dans le LHC.

La descente de la TPC dans le puits de la caverne expérimentale (Images : CERN)