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Dernières nouvelles des accélérateurs : explorer des moyens d’augmenter la performance

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Au fil des ans, les équipes responsables de la chaîne d’injection de protons (Linac 4, Booster du PS, PS et SPS) ont mis au point différents modes de production pour le faisceau LHC, ce qui a permis d’accroître la performance du faisceau et d’étudier si le nombre de collisions au LHC pourrait être accru. En 2023 et jusqu’à la fin de la semaine passée pour 2024, on utilisait ce que l’on appelle un « faisceau standard LHC » composé de lots de 3 x 36 paquets provenant du SPS. Le 24 mai, le LHC est passé en mode « faisceau BCMS » (« compression, regroupement et division des lots ») afin d’étudier dans quelle mesure ce type de faisceau permettrait d’obtenir plus de collisions et de comparer sa performance à celle du faisceau standard.

Dans la chaîne d’injection du LHC, le faisceau standard est produit en injectant dans le PS trois paquets provenant du Booster du PS. Après une première accélération, le PS divise chaque paquet en trois selon un axe longitudinal (voir encadré), ce qui permet d’obtenir neuf paquets. Ces neuf paquets sont ensuite accélérés jusqu’à l’énergie maximale du PS, où chaque paquet est divisé en deux, puis à nouveau en deux ; on obtient ainsi 36 paquets, espacés chacune de 25 ns (voir l’illustration 1).

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Illustration 1 : Le mode de production standard. En bas, les trois bandes représentent les trois paquets injectés par le Booster du PS dans le PS. Au milieu, on voit la division de chacun des trois paquets en trois nouveaux paquets, puis, en haut, on voit que chacun des paquets précédents est divisé en deux, ce qui aboutit à 36 paquets. (Image : CERN)

Le SPS reçoit du PS trois envois de 36 paquets et les accélère à une énergie de 450 GeV, avant de les injecter dans le LHC, dans le sens des aiguilles d’une montre ou dans le sens inverse. Pour chaque paquet en provenance du Booster du PS, ce sont donc 12 paquets qui sont envoyés au LHC. Le nombre de protons par paquet (également appelé « intensité ») requis par le LHC est de 16 x 1010. Compte tenu de ce rapport de 1 pour 12, le nombre de protons par paquet que le Booster du PS doit injecter dans le PS est 12 fois plus élevé (192 x 1010 protons par paquet) que l’intensité des paquets du LHC.

Pour produire un faisceau BCMS, on procède différemment ; on injecte six paquets dans le PS : trois lors d’un premier cycle, et, 1,2 seconde plus tard, trois autres lors d’un deuxième cycle. Après une première accélération, ces six paquets sont comprimés et groupés deux par deux en un seul paquet, ce qui donne trois paquets, qui sont ensuite divisés chacun en trois paquets. Puis, le mode de production redevient identique au mode de production standard, et on aboutit donc également à 36 paquets espacés chacun de 25 ns. Dans ce mode de production, on façonne six paquets pour obtenir 36 paquets, soit un facteur de division de six. Ainsi, pour obtenir une intensité de 16 x 1010 protons par paquet pour le LHC, le Booster du PS n’a besoin de fournir que 96 x 1010 protons par paquet (voir l’illustration 2).

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Illustration 2 : Le mode de production BCMS. En bas de l’illustration, on voit les six paquets injectés par le Booster du PS. Ces paquets sont comprimés et groupés deux par deux pour former trois paquets, à la suite de quoi chaque paquet est divisé en trois. En haut de l’illustration, la même opération de double division en deux est appliquée, comme pour le mode de production standard, ce qui permet d’obtenir 36 paquets. (Image : CERN)

Le LHC utilise le faisceau BCMS depuis environ une semaine, et l’on a déjà pu observer les premiers signes d’une performance supérieure à celle du faisceau standard.

Comment se fait-il que le faisceau BCMS permette d’obtenir plus de collisions dans le LHC alors qu’il contient le même nombre de protons qu’un faisceau standard ?

Le faisceau BCMS a une brillance plus élevée, c’est-à-dire que si le nombre de protons est certes le même, la taille du faisceau, elle, est plus petite. Cela s’explique par le fait que, dans le Booster du PS, l’intensité par paquet est plus faible.

Toute la difficulté est de préserver cette brillance accrue pendant l’accélération dans toutes les machines de la chaîne d’injection du LHC, et dans le LHC à proprement parler. Lors de l’accélération dans le LHC, la taille du faisceau semble augmenter un peu plus avec le mode BCMS qu’avec le mode faisceau standard. L’étude du comportement du faisceau et l’ajustement des paramètres de la machine pourraient permettre dans l’avenir de limiter cette augmentation, et ainsi d’accroître encore le nombre de collisions. Il y aura quelques derniers ajustements dans les semaines à venir. Nous comparerons les résultats pour décider s’il faut continuer à utiliser le mode de production BCMS ou revenir au mode de production standard. Affaire à suivre donc !

La division des paquets en quelques mots :

Dans le monde des accélérateurs de particules, on envisage principalement deux dimensions spatiales : la dimension transversale et la dimension longitudinale.

  • La dimension transversale fait référence aux mouvements des particules, soit horizontaux (de gauche à droite et vice versa), soit verticaux (de haut en bas et vice versa) des particules. Quand on parle de taille transversale du faisceau, on parle donc de la largeur et de la hauteur du faisceau.
  • La dimension longitudinale correspond à l’axe de la trajectoire de l’accélérateur. C’est sur cet axe que nous mesurons la longueur des paquets et l’espacement entre les paquets.
Diviser des paquets signifie diviser un paquet de particules en deux ou trois paquets plus courts selon cet axe longitudinal. La dimension transversale de chaque paquet reste inchangée.