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Qualification d'aimants et de cavités pour le HL-LHC à l'Université d'Uppsala

Qualifying HL-LHC magnets and cavities at Uppsala University
Le cryostat vertical de Gersemi. (Image: CERN)

L'Université d'Uppsala, en Suède, est un partenaire précieux du CERN depuis la fondation du Laboratoire. Dans les années 1950, cette université, qui venait de construire son propre cyclotron, a contribué au développement du tout premier accélérateur du CERN, le Synchrocyclotron. Dans les années 1980, le CERN a aidé Uppsala à construire un accélérateur de protons et d'ions lourds, ainsi qu'un anneau de refroidissement et de stockage appelé CELSIUS. À son tour, au milieu des années 2000, Uppsala a aidé au développement et au fonctionnement de l'installation d'essai du CLIC, CTF3, au CERN. À présent, l'Université d'Uppsala est en train de mettre à niveau son laboratoire FREIA, initialement construit pour le projet ESS, en vue des essais sur les aimants supraconducteurs et les cavités-crabes pour le HL-LHC.

L'Université d'Uppsala a créé en 2011 le laboratoire FREIA, dédié à l'instrumentation et au développement des accélérateurs. FREIA est équipé d'un cryostat horizontal appelé Hnoss, d'une installation d'essai pour les cavités supraconductrices, et d'un cryostat vertical appelé Gersemi. Dans la mythologie nordique, Hnoss et Gersemi sont filles de la déesse Freia.

Gersemi a la particularité de permettre les essais aussi bien des cavités que des aimants. Les cavités sont testées dans de l'hélium liquide à 2 K et sous pression sous-atmosphérique, alors que les aimants sont testés à 2 K et sous pression atmosphérique. Le champ magnétique créé par les aimants est capable de magnétiser toute pièce métallique placée autour du cryostat, par exemple le béton armé. Comme les cavités supraconductrices sont très sensibles aux champs magnétiques, les spécifications de fonctionnalité du cryostat dans ses deux modes de fonctionnement sont sensiblement différentes.

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Une cavité-crabe du HL-LHC en préparation avant l'essai. (Image: CERN)

Gersemi utilise des inserts différents selon qu'il s'agit de tester des cavités ou des aimants, et dispose d'un système de compensation du champ magnétique terrestre pour protéger les cavités supraconductrices ; ce dispositif est contrôlé par un capteur magnétique sur trois axes, prototype produit en collaboration avec l'entreprise britannique Bartington Instruments Ltd.

Le cryostat vertical Gersemi a été installé et mis en service en 2019. Pendant l'été 2020, un premier prototype de cavité-crabe du HL-LHC est arrivé du CERN ; il a été installé dans Gersemi et refroidi à 2 K. Il y a eu ensuite une période intensive d'essais, financée dans le cadre du programme d'accès transnational du projet ARIES subventionné par l'Union européenne. La cavité a alors atteint un champ électrique de 4,6 MV, valeur supérieure de plus de 1,2 MV à la valeur nominale.

« Nous avons surmonté beaucoup d'obstacles et avons franchi beaucoup d'étapes, en particulier s'agissant de la mécanique, du vide, de la cryogénie et du blindage de protection contre le rayonnement », explique Akira Moyazaki, de l'équipe de recherche sur les cavités radiofréquence supraconductrices, responsable de ces essais. « Maintenant, nous sommes prêts pour les cavités ! »

Dans le même temps, les préparatifs pour l'essai d'un aimant correcteur d'orbite pour les HL-LHC étaient en cours. Deux convertisseurs de puissance et unités d'extraction d'énergie mis au point par le CERN ont été envoyées à Uppsala et, le 23 juin 2020, les premiers résultats positifs ont été annoncés.

Une fois le test sur la cavité-crabe terminé, l'aimant a été installé dans Gersemi puis refroidi, d'abord à 4 K, puis à 2 K. De nombreux tests ont été effectués à ces deux températures pour la mise en service de l'ensemble du dispositif servant aux essais d'aimants supraconducteurs. Beaucoup de problèmes mineurs, ou plus conséquents, ont dû être résolus, concernant le matériel des cryostats mais également le matériel et le logiciel du dispositif d'essai. Le 1er avril 2021, le système a enfin été prêt pour la première mise sous tension de l'aimant refroidi à 4 K. Deux semaines plus tard, l'aimant a été refroidi à 2 K, puis de nouveau mis sous tension avec succès. « Après avoir rencontré des difficultés pendant quelques semaines, voire quelques mois, je suis heureux d'annoncer qu'un aimant supraconducteur a été mis sous tension pour la première fois dans le laboratoire FREIA », déclare Kévin Pepitone, ingénieur chargé des essais des aimants. « Tous les systèmes ont fonctionné comme prévu. » L'aimant correcteur d'orbite supraconducteur du LHC a été mis sous tension avec une intensité proche du courant nominal, et un champ de 2,4 T a été produit dans l'unité Gersemi.

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Un aimant correcteur d'orbite supraconducteur du LHC, en préparation avant l'essai. (Image: CERN)

La mise en service du nouvel équipement à Uppsala confirme le rôle important du laboratoire FREIA en tant que complément de l'installation d'essai SM18 au CERN, qui sera prêt à temps pour procéder aux essais sur de nouveaux éléments du HL-LHC.

Outre les tests en cours pour les aimants supraconducteurs à l'installation Gersemi, les équipes d'Uppsala et du CERN ont lancé un nouveau projet de collaboration, dont le but est d'utiliser de nouvelles technologies pour fabriquer un nouveau type d'aimant innovant, avec une configuration dite en cosinus thêta à solénoïdes inclinés. L'idée de base, qui consistait à combiner deux solénoïdes légèrement inclinés en sens contraire, date des années 1960. Ce n'est que maintenant, avec une fabrication assistée par ordinateur précise, que la production industrielle est devenue possible. L'université d'Uppsala et l'Université Linnaeus assureront un transfert de compétences à trois entreprises partenaires en Suède pour le développement de technologies de fabrication de cet aimant. Il s'agit de mettre au point un prototype d'aimant capable, à terme, de remplacer les dipôles correcteurs d'orbite dans le LHC lorsque ceux-ci auront atteint leur fin de vie. Cet aimant devra être compatible, pour ce qui concerne le raccordement, avec les aimants correcteurs d'orbite existants ; cette contrainte limite les options en ce qui concerne l'intensité, la protection contre les transitions, les dimensions totales et les connexions. Le travail de conception a commencé pour ce qui concerne le câble supraconducteur et l'agencement magnétique. Les essais de mise sous tension de l'aimant auront lieu à Gersemi.

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Schéma préliminaire de conception de l'aimant en cosinus thêta à solénoïdes inclinés. En haut, l'enroulement du fil supraconducteur. En bas, l'intensité du champ magnétique, 3,1 T maximum. (Image: CERN)

Ce projet a reçu un financement du programme Recherche et innovation de l’Union européenne, dans le cadre d'Horizon 2020 (accord de subvention n° 730871).