View in

English

Le rôle de la science sur la scène mondiale

Maurizio Bona commente le succès de la célébration du 60e anniversaire du CERN, le 20 octobre au siège des Nations Unies à New York

Suite à la célébration du 60e anniversaire du CERN, le 20 octobre au siège des Nations Unies à New York, Maurizio Bona commente le succès de cet événement et se réjouit de la future relation entre les deux institutions.

Comme mentionné dans un précédent article du Bulletin, le CERN espérait que cette conférence susciterait un dialogue plus fructueux entre scientifiques et décideurs politiques, et qu’elle donnerait naissance à des idées concrètes sur la manière d’inclure les sciences dans les prises de décisions qui influent sur notre futur et sur celui de notre planète. Cette idée avait été discutée au cours des mois précédant la conférence avec tous les partenaires des Nations Unies participant à son organisation, notamment  les visiteurs de marque, les différents ambassadeurs et les intervenants.

Comme le savent bien les ingénieurs, les physiciens et les techniciens, le CERN participe activement à de nombreux réseaux et occupe une place importante au sein de la communauté internationale de la recherche. Notre Organisation a également une excellente réputation auprès des non-spécialistes : les visiteurs se pressent au CERN et de plus en plus de personnes souhaitent mieux nous connaître, que ce soit au travers d’initiatives traditionnelles ou d’outils plus modernes offerts par la technologie numérique. Je dois préciser, cependant, que jusqu’à présent les réactions au sujet de nos initiatives de coopération avec la communauté internationale et multilatérale montrent en général que l’intérêt porté va au-delà d’un simple intérêt générique. L’Organisation des Nations Unies (ONU) nous témoigne non seulement son soutien, mais manifeste aussi de la curiosité et de l’enthousiasme, tout en nous encourageant à nous exprimer sur des sujets relatifs à notre champ d’action.  <0Les suggestions du CERN sont bienvenues et particulièrement respectées, car elles émanent d’une organisation, qui non seulement parle de science, mais fait de la science au plus haut niveau, et qui plus est ne fait pas partie du système des Nations Unies. Cela contribue à apporter une certaine complémentarité entre les activités du CERN et celles des Nations Unies en encourageant la science, l’éducation scientifique et la technologie.

En tant que conseiller auprès du Directeur général en matière de relations avec les organisations internationales, notamment pendant la conférence aux Nations Unies, j’ai apprécié l'accueil chaleureux que nous ont réservé des dirigeants de ce monde, d’éminents diplomates et des fonctionnaires des Nations Unies, le respect porté à la mission de notre Organisation, et l’intérêt que tous ont montré pour mieux comprendre comment elle réussit à unir les peuples et les cultures. La conférence de New York s’est tenue en pleine période de travail de l’Assemblée générale, qui va de la mi-septembre à la mi-décembre. Bien que plusieurs réunions de l’Assemblée générale aient été prévues ce 20 octobre, en même temps que la conférence du CERN, les responsables des trois « piliers » des Nations Unies – le Secrétaire général, le Président de l’Assemblée générale et le Président du Conseil économique et social (ECOSOC) – ont décidé d’y participer, de même que de nombreux représentants permanents des États membres des Nations Unies, certains de pays en développement. Leur présence et leur participation aux discussions montrent clairement la grande estime que l’ONU porte au CERN, et le rôle que notre Organisation peut jouer en soutenant, et peut-être même en améliorant, certains des projets « non politiques » les plus importants des Nations Unies.

Quelques jours après la conférence, je me suis retrouvé avec une longue liste de choses à faire : assister à de nouvelles réunions, promouvoir de nouvelles initiatives, soumettre de nouvelles propositions. Comment faire bon usage de ce soutien ? Certains diront que préconiser plus de science pour tous n’est pas la mission principale du CERN, et ils auraient raison. Cependant, nous savons à présent que nous sommes source d’inspiration pour les populations et les institutions, y compris dans le monde des relations multilatérales, qui nous considèrent comme une institution qui peut participer concrètement à des projets internationaux d’envergure.

Maintenant que nous comprenons mieux notre rôle dans la société, nous devrions en prendre acte et agir en conséquence, en défendant les valeurs qui forment la base de notre travail : la neutralité, l’intégration et la coopération. En outre, le souhait des États membres de voir une coopération plus étroite et plus efficace entre le CERN et le système des Nations Unies repose non seulement sur des principes, mais aussi sur la compréhension que les synergies développées conjointement par le CERN et les Nations Unies (le projet UNOSAT/UNITAR hébergé en partie au CERN, par exemple, ou les projets de transfert de connaissances avec diverses agences de l’ONU, ou bien encore, les écoles organisées dans les pays en développement en collaboration avec l’UNESCO, etc.) représentent un moyen plus efficace d’investir l’argent des contribuables, et sont élaborées pour le bien collectif de l’humanité.

« Alors que nous nous demandons comment poursuivre sur la lancée des Objectifs du millénaire pour le développement et préparer le programme de développement de l’après-2015, ce modèle de collaboration internationale [proposé par le CERN] devrait être imité par d’autres », a déclaré Kofi Annan lors de la conférence à laquelle assistait un large public, ce qui est, semble-t-il, plutôt rare aux Nations Unies pour ce genre d’événements. En outre, la plupart des participants sont restés jusqu’à la fin de la conférence bien qu’elle ait duré plus longtemps que prévu. Les invités prestigieux ont répondu aux questions posées par le public composé de diplomates internationaux, et tout le monde a semblé apprécier les discussions et les trouver utiles.

Et ensuite ? Au vu du fort engagement de la Direction du CERN à l’égard de ces projets, nous continuerons à encourager les liens avec les organisations internationales, en particulier avec le système des Nations Unies. L’objectif stratégique est de hisser, autant que faire se peut, la science et l’enseignement scientifique au sommet de la liste de l’ordre du jour diplomatique. Des rendez-vous importants nous attendent : Beijing+20, Rio+20, et le processus pour définir le programme de développement des Nations Unies pour l’après-2015, qui comprendra des objectifs et cibles de développement durable. Le CERN est invité à participer à tous ces projets, tout en apportant une contribution et un soutien concrets sur la base de ses connaissances dans des domaines tels que l’éducation scientifique et technique, la conservation et le traitement des données, et le transfert de connaissances.

Ces dernières années ont montré que le CERN, et le monde de la science au sens large, ont une place dans la communauté internationale : il influence les principaux débats et projets internationaux liés à la science et à l’enseignement scientifique et, plus important encore, certains processus mondiaux de prise de décision où la science jouait jusqu’alors un rôle marginal. Il est intéressant de noter que les partenaires potentiels qui demandent au CERN d’occuper une telle place appartiennent souvent à des mondes éloignés de celui de la recherche scientifique. Pour reprendre les mots de Martin Sajdik, président du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) : « Cet événement spécial s’inscrit dans le prolongement de l’action entreprise par l'ECOSOC visant à examiner le rôle de la science, de la technologie et de l’innovation dans la promotion du développement durable, ainsi que son étroite collaboration avec le CERN à cet égard. [Par cette conférence,] nous avons réaffirmé que la science est une force puissante au service du bien. L’éducation scientifique et technologique, de même que la recherche fondamentale, sont essentielles à la protection de l’environnement et à l’accroissement du bien-être des citoyens, en particulier dans les pays en développement. »

Après avoir salué les avancées scientifiques du CERN, Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations Unies, s’est félicité de la coopération entre le CERN et l’ONU et a déclaré, « (…) j’invite le CERN à renforcer sa collaboration avec le système des Nations Unies ». Je pense que c’est une opportunité pour notre Organisation, qui contribuera aussi à convaincre les États membres que l’argent qu’ils investissent au CERN est bien dépensé, au vu des résultats scientifiques obtenus et des avantages apportés dans d’autres domaines, comme le développement social, culturel et économique de notre société.