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L'étain magique d'encore plus près

Une mesure du noyau atomique de l'indium 99 dans un état excité de longue durée de vie permet de mieux connaître le noyau de l'étain 100 « doublement magique »

Picture shows researchers working at the ISOLTRAP experiment

Lukas Nies (à droite) et Maxime Mougeot (à gauche) en train d'installer le spectromètre de masse à temps de vol multiréflexion de l'expérience ISOLTRAP. (Image : CERN)

Dans un nouvel article publié dans Physical Review Letters, des chercheurs travaillant à l'installation ISOLDE du CERN décrivent comment une amélioration de l'expérience ISOLTRAP leur a permis de déterminer l'énergie nécessaire pour amener le noyau atomique de l'indium 99 de son état fondamental à un état excité de longue durée de vie, dit isomère. Ce résultat fait suite à une mesure antérieure, effectuée au sein d'ISOLTRAP, de l'indium 99 à l'état fondamental. Il ouvre une perspective sur le noyau de l'étain 100 – noyau « doublement magique » qui n'a qu'un proton en plus que l'indium 99.

Les noyaux atomiques dans lesquels les couches orbitales de protons et de neutrons sont complètement remplies ont un excès de liaison comparé aux noyaux voisins. De telles configurations « doublement magiques » des noyaux permettent de mettre à l’épreuve de façon précise les modèles nucléaires théoriques. Le noyau de l'étain 100, qui compte 50 protons et 50 neutrons, est doublement magique ; c’est aussi le plus lourd des noyaux composés d'autant de protons que de neutrons. Cependant, il est particulièrement difficile à produire en laboratoire, et sa durée de vie est relativement courte. C'est pourquoi, pour arriver à découvrir ses secrets, les scientifiques préfèrent exploiter des noyaux voisins plus faciles à produire.

Dans sa dernière étude, l'équipe d'ISOLTRAP s'est penchée sur l'indium 99, plus particulièrement son isomère, dont l'occupation orbitale est légèrement différente, de celle de l'indium 99 à l'état fondamental, ce qui lui confère une masse nucléaire légèrement plus élevée. Grâce à la version améliorée du spectromètre de masse à temps de vol multiréflexionde l'expérience, l'équipe a pu mesurer une différence entre les temps de vol des noyaux d'indium 99 confinés, dans leur état fondamental et dans leur état isomérique. Cette légère différence, due à une différence de masse des noyaux dans ces deux états, a permis de déterminer l'énergie nécessaire à l'excitation de l'isomère.

L'équipe a ensuite comparé ce résultat avec des mesures d'énergie d'excitation des isomères pour d'autres noyaux d'indium voisins, y compris avec la mesure effectuée par ISOLTRAP de l'indium 101. Cette comparaison a montré que les énergies d'excitation sont essentiellement les mêmes, et ce, jusqu'au nombre magique de 50 neutrons. Le résultat obtenu contraste fortement avec les récents résultats sur les moments magnétiques des noyaux d'indium de l'expérience CRIS d'ISOLDE, où la valeur remarquablement constante connaît un changement abrupt lorsqu’on arrive au nombre magique de 82 neutrons.

Les chercheurs ont aussi comparé les résultats avec plusieurs types de calculs théoriques sophistiqués, y compris les calculs dits « ab initio », qui tentent de décrire les noyaux à partir de principes premiers. Ils ont ainsi trouvé que tous les calculs peinent à prédire simultanément les énergies d'excitation des isomères et les moments magnétiques.

Ces résultats vont orienter les chercheurs dans leurs efforts pour mettre au point une description entièrement ab initiodes noyaux, efforts qui ont déjà permis des avancées prometteuses.