Le LHC a battu un nouveau record de luminosité à la mi-juillet, à peine deux semaines après le premier remplissage totalisant 2556 paquets par faisceau qui, le 28 juin, avait fourni des événements aux quatre expériences. Ce nouveau record intervient malgré quelques pertes anormales observées pendant la montée en intensité du faisceau.
Après la remise en service avec faisceau du LHC, au mois de mai, les opérateurs ont progressivement fait augmenter le nombre de paquets de chaque faisceau pendant la montée en intensité, qui s’est achevée le 28 juin ; les faisceaux entrant en collision contenaient alors 2556 paquets chacun. À mesure que l’intensité augmentait, des pertes inattendues ont cependant été observées pour les deux faisceaux, lors de plusieurs remplissages, à proximité d’un aimant d’interconnexion de l’arc situé entre ATLAS et ALICE, et ces pertes ont entraîné des arrêts de faisceau. La présence de noyaux sur le passage du faisceau, probablement sous forme de gaz, pourrait peut-être expliquer ces pertes de faisceau localisées. Des vérifications de l’ouverture de la chambre à vide lors de l’injection n’ont révélé aucun obstacle.
Le fonctionnement du LHC a déjà, par le passé, été perturbé considérablement par des éléments que l’on a surnommés UFO (Objets volants non identifiés) ; on pense maintenant qu’il s’agissait de particules de poussière d’environ dix micromètres de diamètre en suspension sur la trajectoire du faisceau. Les interactions qui s’ensuivent entre les protons du faisceau et les noyaux des particules de poussière peuvent entraîner des pertes de faisceau, lesquelles, si les particules sont suffisamment grandes, causent des transitions résistives dans les aimants supraconducteurs du LHC. Dans la plupart des cas, les détecteurs de perte de faisceau installés sur toute la circonférence du LHC détectent la perte avant que la transition résistive ait lieu, et ils arrêtent alors le faisceau de façon préventive. Les années précédentes, environ 20 remplissages pouvaient être perdus, chaque année, à cause d’UFO de grandes dimensions. Heureusement, le nombre d’UFO décroît régulièrement et leur impact sur le fonctionnement diminue.
Après le premier long arrêt, en 2015, un objet surnommé ULO (Objet statique non identifié) a été détecté. Cet objet est posé sur le fond de la chambre à vide du faisceau 2, entre LHCb et ATLAS. Heureusement, la chambre à vide est suffisamment grande et l’ULO suffisamment petit pour que les aimants de guidage puissent faire éviter l’ULO au faisceau. Grâce à cette mesure, l’ULO ne perturbe pas le fonctionnement du LHC, même aux intensités les plus élevées.
Les pertes récemment observées présentent des similarités avec celles liées aux UFO et à l’ULO, mais leur mécanisme exact n’a pas encore été compris. Pendant l’exploitation pour la physique, les scientifiques profitent de collecter en sus des données sur les caractéristiques observables du faisceau, dans le but de caractériser les pertes et de définir des mesures d’atténuation. Pendant la semaine du 20 juillet, il est apparu que la génération d’un champ magnétique suffisamment puissant dans un dipôle de guidage situé à proximité diminuait les pertes. Cette technique est actuellement appliquée afin de permettre une production pour la physique stable malgré la présence de ce problème. Ce dernier n’a pas empêché le LHC d’atteindre, pendant la deuxième semaine de juillet, un nouveau record de luminosité, 1,67x1034 cm-2s-1.
Les 26, 27 et 28 juillet ont été consacrés à établir l’échelle absolue de la luminosité à 13 TeV. La luminosité d’un collisionneur est un paramètre très important, car la précision de la mesure de la section efficace de production, pour un processus de physique donné, dépend fortement de la précision de la mesure de la luminosité. La luminosité est également le facteur habituellement utilisé pour évaluer l’efficacité du fonctionnement du collisionneur.
Une optique et des paramètres de faisceau bien particuliers sont nécessaires pour réaliser cette opération ; ces deux éléments sont réglés de façon à réduire le plus possible l’incertitude lors de la mesure. La méthode a été utilisée pour la première fois par Simon van der Meer en 1968, auprès des anneaux de stockage à intersections du CERN. La cadence des collisions proton-proton inélastiques est enregistrée par des détecteurs de luminosité spécifiques auprès des expériences pendant que les faisceaux sont déplacés de manière à se croiser, d’abord horizontalement puis verticalement. Ce « balayage VdM » fournit une mesure de la zone où les faisceaux se recoupent, laquelle est proportionnelle à la dimension transversale des faisceaux, premier ingrédient nécessaire pour résoudre l’équation de la luminosité. Le second ingrédient essentiel est la mesure précise, réalisée simultanément, de l’intensité des courants des paquets, mesure effectuée au moyen de divers dispositifs de la machine et des expériences. Ces données, combinées avec le nombre total de paquets par faisceau, permettent d’obtenir un étalonnage direct des détecteurs de luminosité des expériences. Après une journée de préparation, deux remplissages, qui ont duré 8 et 14 heures, ont été consacrés à ces « balayages VdM » auprès de chacune des expériences.