View in

English

Dernières nouvelles du LHC : la machine est pleine !

La montée en intensité s’est achevée le 5 mai, soit avec 10 jours d’avance ; dès maintenant, le LHC contiendra des faisceaux de 2 556 paquets chacun

|

LHC Report: The LHC is full!

L’ascension rapide de la courbe de la luminosité intégrée pour 2018. Pour ceux qui ont tendance à extrapoler, nous rappelons que des arrêts techniques, des sessions de développement machine et des exploitations spéciales pour la physique sont prévus.

Comme mentionné dans les Dernières nouvelles du LHC du numéro précédent, le LHC a reçu le 28 avril des faisceaux contenant 1 200 paquets et, pendant la campagne de nettoyage, une certaine activité a été observée dans l’interconnexion de la cellule 16L2, zone où, en 2017, des condensés de gaz avaient régulièrement causé des pertes de faisceaux. On ignorait à ce moment-là si cette activité était suffisamment sérieuse pour brider la performance de cette année, pour laquelle un plus grand nombre de paquets serait nécessaire. Pendant les étapes suivantes de la montée en intensité (soit avec 1551, 1887, 2175, 2319, 2460 et enfin 2556 paquets par faisceau), les pertes de faisceaux survenant dans la zone 16L2 ont été suivies de près. Ces pertes de faisceau sont de deux types : il y a d’une part une perte régulière et constante, qui dépend du nombre total de particules dans chaque faisceau. Ce type de perte reste largement au-dessous du seuil susceptible de provoquer un arrêt de faisceaux, grâce notamment à un solénoïde spécial qui a été installé pendant le second semestre de l’année 2017. Il y a d’autre part des « pics » de pertes de faisceaux, qui apparaissent de façon erratique ; ils viennent s’ajouter aux pertes constantes et peuvent potentiellement dépasser le seuil au-delà duquel un arrêt de faisceau est déclenché. Les pertes de faisceaux constantes tendent à augmenter avec le nombre de paquets, mais heureusement la fréquence des pics de pertes a baissé à mesure que le faisceau circulait dans la machine. L’entraînement a ainsi permis de faire disparaître ces pics, et il a donc été possible de remplir entièrement la machine pour l’exploitation.

Un autre événement encourageant a eu lieu le samedi 5 mai, pendant les dernières étapes de la montée en intensité : la luminosité de crête moyenne pour ATLAS et pour CMS s’est approchée de 2,1 x 1034 cm-2s-1, c’est-à-dire qu’elle pourrait égaler ou même dépasser la luminosité de crête record de 2017. Il faut toutefois prendre cette valeur avec précaution car la calibration finale des mesures de la luminosité, qui est fournie par les expériences, n’a pas encore être réalisée. Elle le sera au moyen du procédé appelé balayage van der Meer, et devrait avoir lieu pendant le week-end du 23 au 24 juin. La valeur de la luminosité de crête pourrait donc se révéler légèrement différente.

Depuis le début de la montée en intensité, l’optimisation de la luminosité, réalisée par anti-égalisation, a été testée et utilisée. Vous vous demandez peut-être en quoi consiste cette technique ;: pendant les cycles, la luminosité instantanée et l’intensité du faisceau baissent (la luminosité « se consume »). Après un certain temps, il devient possible de réduire l’angle de croisement lors des collisions, ce qui a pour effet de faire légèrement augmenter la luminosité instantanée, en entraînant une plus grande accumulation de luminosité dans le même intervalle de temps. Ce procédé a été utilisé avec succès pendant l’exploitation de 2017. Pour l’exploitation de 2018, une étape supplémentaire a été ajoutée à la fin du cycle, après les réductions initiales de l’angle de croisement ; celle-ci consiste à compresser davantage le faisceau afin d’atteindre des dimensions encore plus petites. Chaque cycle commence ainsi avec un faisceau compressé jusqu’à atteindre un paramètre bêta étoile (b*) de 30 cm, soit la valeur utilisée en 2017. Suivant le processus d’optimisation, deux réductions supplémentaires, d’abord à 27 cm, puis à 25 cm, ont ensuite lieu. En plus d’optimiser la production de luminosité, ce procédé permet de tester les divers types d’égalisation (égalisation de l’angle de croisement et du paramètre b*) qu’il est prévu d’utiliser régulièrement pendant l’ère du HL-LHC.

À partir de maintenant, le LHC est en mode de production pour la physique. Le fonctionnement de la machine sera consolidé en parallèle, ce qui signifie que les paramètres de la machine seront encore affinés, les durées de vie des faisceaux optimisées, la performance stabilisée et, si possible, améliorée. Mardi 8 mai, la luminosité intégrée pour ATLAS et pour CMS était déjà de 5,93 fb-1 (sur les 60 fb-1 prévus pour 2018).

Les compteurs de la luminosité intégrée. À gauche : pour ATLAS et pour CMS, avec un objectif de 60 fb-1. À droite : pour LHCb, dont l’objectif est de 2 fb-1.

Dans l’ensemble, c’est un fort beau début pour cette saison de prise de données qui, nous l’espérons, sera très fructueuse pour les expériences. Un grand merci à toutes les personnes qui ont rendu possible un démarrage aussi efficace : cela a été un véritable travail d’équipe !